Dans notre première trilogie d’articles sur les accords viandes et vins, nous vous rappelions l’importance du mode de cuisson dans le choix du vin qui accompagnera vos plats carnés. Cette règle d’or s’observe aussi dans le cas des légumes ! Et comme pour les viandes, les couleurs des produits influencent grandement ce choix. Toutefois, ce n’est pas tout : à l’image des viandes pour lesquelles on distingue différentes catégories en fonction des morceaux (voir notre article sur les viandes rouges pour plus de précision), nous pouvons également déterminer différentes catégories de légumes. C’est peut-être même le critère le plus déterminant d’un accord réussi. Démonstration !
Les légumes-tiges et les légumes-feuilles / fleurs rassemblent les épinards, les blettes, les cardes, les salades et endives, les artichauts ou encore les asperges, le céleri-branche… soit les légumes les plus difficile à accorder ! Riches en chlorophylle, ils présentent un caractère végétal plus ou moins prononcé, ainsi qu’une amertume et une acidité qui compliquent considérablement l’exercice. On oublie donc les vins rouges, même faiblement tanniques, qui leur conféreraient un goût métallique. Une astuce consiste à les marier avec le même vin blanc que vous auriez choisi pour accompagner un fromage de chèvre ! Ces derniers, également très acides et amers, s’accordent à merveille avec les vins de Loire à base de sauvignon blanc, melon de Bourgogne (le Muscadet-Sèvres-et-Maine). Ces légumes apprécieront également la vivacité et les notes végétales des vins blancs à base de vermentino (ceux de Corse, Provence et Collioure en tête), de sylvaner ou encore de sacy (qu’on retrouve dans quelques vins confidentiels de Bourgogne). Les vins blancs de Grèce ou de l’Etna seront également les bienvenus, sans oublier les chenins secs travaillés sur la texture et le relief qu’on trouve en Anjou. Notons qu’en plus, il n’est pas rare de cuisiner ces légumes avec ces mêmes fromages. Cuits, on pourra s’orienter sur un vin plus opulent, mais toujours très floral, de la Vallée du Rhône (Saint-Joseph, Cairanne, Châteauneuf-du-Pape) dégusté sur la jeunesse du fruit, ou encore un corbières blanc.
Concernant les légumes-fruits, les accords différeront selon la couleur : les poivrons verts, haricots verts, petit-pois présentent tous des notes assez végétales quand ils sont consommés crus, mais tendent vers plus de douceurs avec la cuisson. Ils peuvent ainsi répondre aux mêmes règles d’accords que pour les légumes-feuilles. Mention spéciale au concombre et à la courgette, riches en eau et dont le goût délicat appréciera la discrétion florale d’un pinot blanc d’Alsace. Sur les légumes rouges crus, telles que la tomate ou le poivron rouge, plutôt marqués par l’acidité, les vins blancs d’assemblage du Languedoc ou du sud-ouest iront à merveille : maccabeu et vermentino, petit et gros manseng vinifiés en sec, mauzac vert ou encore assemblage de clairette et rolle… Cuits, on pourra s’orienter vers des rouges très charnus, juteux, faiblement tanniques, à base de grenache, gamay, et même merlot vinifié en cuve. La betterave fait toutefois exception à la règle. Ce tubercule à la fois sucré et terreux pourra être associée à un cabernet-franc un peu évolué de Loire : pour une fois que les notes végétales et telluriques de ce cépage en font sa force dans un accord, cela mérite d’être souligné ! Les légumes fruits que sont les aubergines, quant à eux, seront idéalement accordés à des vins blancs onctueux et amples (Bourgogne, Rhône, Languedoc-Roussillon ou encore Bordeaux, dans les Graves). Cependant, selon la matières dont on les accommode, on pourra également envisager un rouge juteux et fruité comme on en trouve dans le Beaujolais ou la Bourgogne (sur des appellations simples et d’ouverture facile, comme un Coteaux Bourguignon), ou même tenter l’expérimentation d’un Savennières légèrement oxydatif sur des préparations aux épices indiennes.
Enfin, terminons par les plus complexes : les légumes crucifères et les tubercules. Les premiers sont en fait des légumes fleurs, les seconds, des légumes racines. Les crucifères regroupent la délicates famille des choux : vous imaginez bien la délicatesse de l’accord ! On pourra partir sur un vin blanc d’Alsace à base de riesling ou sylvaner, ou encore un vin du Jura à base de savagnin. La jacquère et le gringet, tous deux savoyards, peuvent également proposer un accord intéressant. Les choux verts rôtis, braisé, servis farcis ou en potée peuvent également apprécier la compagnie d’un vin rouge à base de gamay, de grenache associé à une pointe de cabernet franc ou de cabernet sauvignon, voire de mourvèdre avec un peu d’âge. Le chou-fleur en gratin ou en velouté, en crème ou en beignet pourront tout à fait s’accorder avec un champagne à base de meunier et chardonnay… ou mieux, si vous trouvez, à base de pinot blanc, d’arbanne et de petit meslier ! Un style assez peu conventionnel, que vous retrouverez bien évidemment dans nos caves…
Vous le constaterez donc, les possibilités d’accords sont multiples et nous n’avons que survoler les nombreuses combinaisons envisageables ! Garder en tête la petite astuce du fromage, elle peut se décliner à de nombreux légumes !
Amusez vous et n’oubliez pas, non plus, de boire de l’eau !